Retour sur le caractère inopérant des dispositions nationales contraires aux actes uniformes de l’OHADA

HILIM Tchamyèlaba Gérard
Par HILIM Tchamyèlaba Gérard
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Retour sur le caractère inopérant des dispositions nationales contraires aux actes uniformes de l’OHADA

Arrêt CCJA 1ère Ch., n° 041/2018 du 28 février 2018, Gagou Kossivi Setiwu C/ Société Ecobank Togo SA

« Le client impécunieux qui règle son dîner au restaurant en faisant la plonge ou en dessinant une œuvre d’art sur la nappe » fait la dation en paiement[1]. La dation en paiement est ainsi le fait pour un débiteur de donner en paiement au créancier une chose différente de celle qui faisait l’objet de l’obligation[2]. Comme telle, la dation en paiement ne saurait être perçue comme une sûreté en garantie du remboursement d’une somme d’argent, d’autant plus qu’elle ne figure pas au rang des sûretés retenues par le législateur de l’AUS[3]. De plus, en matière de recouvrement de créances dans l’espace Ohada[4], aucune procédure non prévue par l’AUPSRVE[5] ne peut être mise en œuvre. C’est ce qui ressort de l’arrêt du 28 févier 2018 rendu par la première chambre de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA).

Les faits de l’espèce sont les suivants : par convention de crédit en date du 15 juin 2010 modifiée par avenant en date du 9 décembre 2010, la Société Ecobank Togo SA a accordé divers concours financiers à la Société Groupement de Transaction et de Corporation (GTC Sarl). En guise de sûreté et garantie de paiement de cette somme, monsieur Gagou donnait à la banque, sous condition suspensive de l’inexécution des obligations de la société GTC Sarl, un immeuble bâti. En outre, l’avenant du 9 décembre 2010 incluait la dation en paiement également sous condition suspensive, comme garantie de remboursement de la créance. A l’échéance, la société GTC Sarl n’étant pas en mesure d’effectuer le paiement de cette créance, la banque a décidé de procéder à la réalisation de la dation en paiement.

Ont successivement connu de l’affaire, la juridiction présidentielle du Tribunal de Première Instance de Lomé dont l’ordonnance sur requête N° 2105/2015 du 08 octobre 2015 a été rétractée par le juge des référés dudit Tribunal par ordonnance N° 0020/2016 du 25 janvier 2016, la Cour d’appel de Lomé qui s’est prononcée par arrêt N° 248/2016 en date du 27 juillet 2016 et la première chambre de la CCJA dont la décision fait l’objet du présent commentaire.

Devant le juge du fond, la Société Ecobank-Togo SA sollicite une décision qui lui permettrait de réaliser la dation de l’immeuble de monsieur Gagou en paiement de sa créance. Au soutien de sa demande, elle argue que conformément à la convention du 09 décembre, la Société GTC Sarl n’ayant pas pu honorer son engagement, elle n’a d’autres choix que de faire exécuter son garant. Monsieur Gagou quant à lui, s’oppose à l’action de la banque et refuse l’attribution de son immeuble à cette dernière.

Saisi en premier, le juge des requêtes du Tribunal de Première Instance de Lomé rend une décision constatant la réalisation de la dation en paiement et le transfert de l’immeuble querellé à la banque. Sur assignation en référé, le Président dudit Tribunal rétracte l’ordonnance attaquée, au motif que la dation en paiement n’ayant pas été retenue par l’AUS comme sûreté, c’est en violation de la loi communautaire qu’elle a été insérée dans la convention de compte courant comme garantie de remboursement du crédit accordé à la Société GTC Sarl.

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