L’OBJET DU NANTISSEMENT DE COMPTES DE TITRES FINANCIERS DANS L’AUS

AVEGNON Koffi Edem
Par AVEGNON Koffi Edem
140 min de lecture

Résumé:

Le nantissement de comptes de titres-financiers est une sûreté spéciale. Son objet doit porter sur un bien déterminé et précis. Or, l’objet de ce nantissement repose sur un ensemble d’éléments à savoir le compte-titres et les titres financiers. De la sorte, le nantissement du compte-titres – le contenant des titres-financiers – ne saurait se faire en dehors de ces derniers. Ces éléments forment un ensemble indissociable. Cependant, on observe un tableau contrasté de l’objet de ce nantissement.

D’abord, le compte-titres répond plus ou moins aux conditions de droit commun d’existence de l’objet. Il est déterminé, car son existence est certaine, mais son identification n’est pas claire. Ensuite, le contenu du compte-titres est particulièrement évolutif et fluctuant en faveur du créancier. Dans ces conditions d’instabilité du contenu nanti et son cantonnement au profit du créancier, le débiteur perd le droit d’accès à d’autres crédits sur le même actif. Enfin, le droit spécial de rétention sur l’objet nanti est illusoire faute d’une assiette certaine.

Conséquemment, la reconfiguration de l’objet du nantissement de comptes de titres financiers s’avère inévitable. Elle consisterait à restructurer et à réorganiser l’ensemble nanti. La restructuration s’imposerait par la nécessité de rendre obligatoire l’ouverture d’un compte-titres spécial et de redimensionner utilement le droit spécial de rétention.

De plus, il y a lieu de stabiliser le contenu de la sûreté de sorte à favoriser l’institution d’un nantissement successif sur le même objet. La stabilisation du contenu nanti serait profitable au créancier en termes de valeur des actifs nanti et au constituant qui bénéficiera de la possibilité d’obtenir d’autres financements sur le même actif financier. Ceci étant, les titres financiers initiaux, de substitution ou complémentaires, rangés en éléments permanents du compte nanti, pourraient être rangés sur des comptes spéciaux différents. Les fruits et les produits, classés dans les éléments monétaires non permanents, figureraient sur un compte spécial.

Introduction

Evoquer la notion de l’objet, en ce moment où la réforme française du droit des contrats a franchi ce pas[1], peut surprendre et paraître d’un intérêt limité. Pourtant, s’agissant d’une sûreté spéciale[2], comme le nantissement de comptes de titres financiers, l’importance de l’analyse de son objet est incontestée[3] en droit OHADA[4]. L’assiette de cette sûreté spéciale repose sur son objet, dont la particularité occupe une place privilégiée à l’instar des autres sûretés[5]. De la sorte, sa description comme un gisement de valeur, circonscrit en masse et défini en genre reste d’actualité[6]. Certains l’ont appréhendé sous l’angle du droit financier[7]. D’autres, en revanche, se sont appesantis sur la particularité de la sûreté elle-même[8]. Or, l’étude de l’objet du nantissement de comptes de titres financiers transcende le droit civil, le droit des sociétés, le droit des biens et le droit financier. Son importance dans la vie des affaires est plus qu’évident. Considéré comme un terreau fertile pour le développement du crédit et l’accès au financement sur le marché financier, le législateur OHADA a entériné cette considération et l’a mise en œuvre dans le cadre de la réforme du droit des sûretés[9].

Dans la terminologie juridique civiliste, le concept d’objet est polysémique. Dans son sens matériel, l’objet de l’acte juridique[10] désigne la ou les choses qui en sont la matière réelle[11]. En revanche, dans son acception juridique, l’objet s’entend de l’effet de droit que les parties se proposent d’atteindre ou de réaliser en agissant[12]. Mais pour le Doyen Jean Carbonnier, le mot objet a un sens précis. Il désigne ce sur quoi la volonté des parties au contrat s’est portée[13]. A cet effet, l’objet du nantissement de comptes de titres financiers au sens de la présente étude se résume à la prestation ou à la chose promise par le constituant en sa qualité de débiteur[14]. Il se rapporte à la matière même ou à la chose objet du nantissement.

Le nantissement, en soi, est défini à l’article 125 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés, ci-après désigné AUS[15]. Si le législateur OHADA, lors de la réforme de l’AUS, ne s’est pas efforcé d’organiser un régime général du nantissement, à tout le moins, il a soumis le nantissement de comptes de titres financiers à un régime particulier à partir des articles 146 et suivants de l’AUS. Le mérite revient donc au législateur communautaire qui, aux termes de l’article 146 AUS, a défini le nantissement de comptes de titres financiers comme « … la convention par laquelle le constituant affecte en garantie d’une obligation l’ensemble des valeurs mobilières et autres titres financiers figurant dans ce compte ».

Article réservé aux Abonnés

Abonnez-vous à partir de 2000 FCFA pour accéder à tous les articles du site.

Partager cet article
Laissez un commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous n’êtes pas autorisé à copier ce contenu.