De la bonne rédaction et de la bonne exécution des clauses de tacite reconduction dans les baux professionnels OHADA

Me Julien KOKOU
Par Me Julien KOKOU
26 min de lecture

Selon plusieurs arrêts de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) rendus entre 2006 et 2020 “les dispositions de l’article 92 [124 nouveau] de [l’AUDCG] étant d’ordre public, il ne peut y être dérogé par convention des parties ; que, de même, il ne saurait être déduit d’un quelconque comportement [du bailleur] et notamment de l’encaissement d’un loyer, la volonté [du bailleur] de reconduire tacitement ou implicitement le contrat de bail litigieux en violation desdites dispositions d’ordre public de l’article 92 [124 nouveau] de l’Acte uniforme susvisé[1]CCJA arrêt n°087/2020 du 9 avril 2020.

Cette solution a été dégagée pour la première fois dans un arrêt du 30 mars 2006 (OHADATA N°J-07-12). Depuis, seuls trois arrêts ont été rendus par le CCJA dans le cadre d’actions en expulsion intentées par des bailleurs qui se prévalent de la déchéance du droit au renouvellement, contre des preneurs qui font valoir l’existence d’un bail tacitement reconduit[2]Arrêt du 14 novembre 2013 (OHADATA J-15-70), arrêt du 9 avril 2015 (OHADATA J-16-29), et arrêt n°087/2020 du 9 avril 2020.. Dans ces trois arrêts la CCJA a systématiquement et fermement appliqué sa position dégagée en 2006. La jurisprudence en la matière est donc établie de longue date – et fréquemment invoquée devant les juges nationaux – qui dénie tout effet juridique à la tacite reconduction dans les baux professionnels à durée déterminée, dès  lors que le preneur n’a pas respecté le formalisme de notification de son droit au renouvellement édicté par l’article 124.

Cette jurisprudence présente toutefois l’inconvénient – majeur – de créer une grande insécurité juridique pour les preneurs de bonne foi qui ont poursuivi leurs activités dans le local au-delà du terme initial du bail, parfois pendant de nombreuses années, avec l’accord du bailleur, mais (ou plutôt, devrais-je dire, « et donc ») sans procéder à la notification formelle de leur droit au renouvellement. Cette épée de Damoclès qui plane au-dessus des preneurs de baux professionnels à durée déterminée est d’autant plus regrettable que le mécanisme du droit au renouvellement a été instauré pour les protéger (protéger leurs investissements et leurs revenus d’activité professionnelle, généralement directement corrélés à l’emplacement du local) contre des résiliations unilatérales et arbitraires par les bailleurs ou leurs ayant-droits.

Or, il nous semble qu’une analyse des décisions de la CCJA dans ce domaine, notamment une décision antérieure rendue en 2002, pourrait laisser entrevoir des pistes d’une possible (r)évolution jurisprudentielle vers un retour à la position dégagée par la CCJA en 2002.

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Références

Références
1 CCJA arrêt n°087/2020 du 9 avril 2020
2 Arrêt du 14 novembre 2013 (OHADATA J-15-70), arrêt du 9 avril 2015 (OHADATA J-16-29), et arrêt n°087/2020 du 9 avril 2020.
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